Technologies DARQ: reculer pour mieux sauter

Offert par Les Affaires


Édition du 14 Avril 2021

Technologies DARQ: reculer pour mieux sauter

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Édition du 14 Avril 2021

Par Philippe Jean Poirier
Éric Cothenet

Éric Cothenet, directeur des solutions technologiques chez Novipro (Photo: courtoisie)

TRANSFORMATION NUMÉRIQUE. Les entreprises les plus innovantes se projettent aujourd’hui avec enthousiasme dans la relance. La question est maintenant de savoir comment les technologies DARQ — acronyme anglophone qui regroupe l’intelligence artificielle (IA), le registre distribué (distributed ledger), la réalité étendue (extended reality) et l’informatique quantique — auront été affectées par la crise sanitaire.

On retient du portrait 2021 des TI dans les grandes et moyennes entreprises cana-diennes réalisé par Léger pour Novipro que plusieurs dirigeants ont renoncé à investir en IA (38 % en 2019 contre 29% en 2020) et dans la technologie de chaîne de blocs (23% en 2019 contre 11 % en 2020). Du moins à brève échéance. Mais peut-être s’agit-il d’un repli stratégique visant à relancer l’innovation sur des bases plus avancées.

Éric Cothenet, directeur des solutions technologiques à Novipro, souligne que 87 % des dirigeants sondés considèrent l’IA comme un levier important dans leur entreprise. «On doit garder en tête qu’elle est aussi présente dans les solutions de cybersécurité et de reconnaissance faciale, explique-t-il. Les entreprises l’adoptent donc indirectement.»

L’intégration de la chaîne de blocs (blockchain) à leurs activités semble moins apparente. Cette technologie ne manque pourtant pas de vertu:impossible à corrompre en raison de son caractère «distribué»— l’information se retrouve simultanément sur plusieurs serveurs —, elle est aussi un exemple de transparence, puisque les informations qu’elle contient sont publiques et accessibles en tout temps.

Ses adeptes annoncent son utilisation sous forme de contrat intelligent assorti de clauses automatisées. «Prenons l’exemple d’une assurance récolte, illustre Charlaine Bouchard, notaire et titulaire de la Chaire de recherche sur les contrats intelligents et la chaîne de blocs. Lorsqu’un agriculteur traverse 60 jours sans pluie, il obtient son indemnité automatiquement, sans avoir à faire de réclamation.»

Il existe plusieurs scénarios d’utilisation de la chaîne de blocs dans des secteurs aussi variés que le droit, la construction et les chaînes d’approvisionnement, mais peu d’entreprises osent faire le saut. Un frein à l’adoption de cette technologie est que plusieurs de ces secteurs tardent à prendre le virage numérique dans son ensemble.

«Avant la pandémie, les actes notariés n’étaient toujours pas dématérialisés, rappelle Charlaine Bouchard. Maintenant que c’est permis, on peut envisager la création d’une chaîne de blocs notariée.»Les notaires pourraient alors produire des contrats de vente ou d’hypothèque dont les clauses s’exécutent d’elles-mêmes. «Cela faciliterait la vie des clients, puis ça libérerait du temps aux notaires, qui pourraient se concentrer sur leur travail de conseil», note-t-elle.

Un autre frein est la lourdeur de calcul des chaînes de blocs qui utilisent la «preuve de travail»(mécanisme qui repose sur la résolution d’un problème cryptographique complexe) pour valider l’ajout d’une information dans le registre numérique. «Cette tendance est appelée à changer, croit cependant Charlaine Bouchard. Plusieurs chaînes de blocs, dont l’Ethereum, s’apprêtent à adopter la “preuve d’enjeu” [mécanisme qui repose sur la preuve de possession d’une quantité donnée de cryptomonnaie mise en garantie], qui est beaucoup moins énergivore.»

La notaire voit un bel avenir à cette technologie. «La pandémie a été un électrochoc pour plusieurs entreprises. Elles ont vu l’importance de passer au numérique et elles se posent maintenant des questions sur la chaîne de blocs.»Cette convertie a d’ailleurs donné des conférences à ce sujet dans le milieu culturel (pour la protection du droit d’auteur) et du transport maritime (pour le suivi des marchandises).

L’informatique quantique est sans l’ombre d’un doute la technologie DARQ la plus discrète. Pour le moment, sa vertigineuse puissance de calcul sert principalement aux chercheurs à améliorer les modèles de prédictions météorolo-giques, à étudier les comportements des marchés et à optimiser des itinéraires routiers. Des applications qui pourraient sans doute servir à de nombreuses entreprises.

À l’autre bout du spectre, la réalité étendue connaît son heure de gloire auprès du grand public. Dans un monde en perpétuel confinement, la réalité virtuelle devient soudainement attrayante pour un grand nombre de gens. Les entreprises technologiques l’ont bien compris.

Microsoft a lancé, début mars, sa plateforme de réalité augmentée, baptisée Mesh, qui pourra servir à tenir des réunions ou des remue-méninges à distance. Au Québec, le Centre collégial de transfert de technologie INÉDI a mis à la disposition de 10 entreprises membres d’Alliance Métal Québec une plateforme de réalité virtuelle et augmentée permettant de faire des présentations techniques à distance.

La réalité augmentée est aussi utilisée en marketing, pour faire découvrir des produits. Le fabricant automobile Ford a créé une série de vidéos interactifs utilisant cette technologie afin de permettre à ses clients potentiels de faire l’essai de la nouvelle Mustang Mach-E électrique, sans se rendre en magasin.

De leur côté, les gens qui souhaitent se procurer de nouvelles lunettes chez Vu Optique, à Anjou, n’ont qu’à ouvrir leur webcam pour les essayer virtuellement.

La monture suit les mouvements de tête à l’écran, ce qui renvoie une image assez juste du modèle sur son visage.

Reste maintenant à savoir si la réalité virtuelle plaira encore autant après la pandémie, quand les rencontres en personne seront de nouveau permises.

 

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