Daniel Côté, directeur générale du Patro Villeray (Photo: 123RF)
PHILANTROPIE. En pleine pandémie de COVID-19, deux organismes du quartier Villeray ont fusionné pour devenir une toute nouvelle entité, avec son identité, son offre de service et son mode d’opération propres. Rencontre avec le directeur général qui a été aux premières loges d’une mutualisation totale.
Daniel Côté semble apprécier les aphorismes. Le directeur général du Patro Villeray, un complexe communautaire officiellement né en janvier 2021 qui offre divers services en loisir, en aide alimentaire et en prévention de la sécurité urbaine, a une formule imagée pour la plupart des notions mettant en contexte la naissance de l’organisme qu’il dirige. « Tout seul, on va plus vite. Ensemble, on va plus loin », dit-il par exemple pour illustrer les avantages de l’union du Patro Le Prévost et du Centre de loisirs communautaires Lajeunesse, à l’automne 2020.
Parmi toutes les pratiques de mutualisation, la fusion est certainement la plus extrême. Au Patro Villeray, cette option s’est présentée graduellement. Daniel Côté est arrivé comme directeur du développement au Patro Le Prévost en 2019. « Lors de ma deuxième journée de travail, on avait une rencontre avec le Centre Lajeunesse. À cette époque-là, on ne parlait pas encore de fusion, on parlait de cohabitation ».
Le Patro Le Prévost, organisme centenaire issu du mouvement des « Patros » (pour patronage), regroupement de centres de loisirs aux origines religieuses, avait pignon sur rue sur le boulevard Christophe-Colomb. Le Centre Lajeunesse, lui, était aux prises avec une recherche de locaux infructueuse. Le CSSDM, propriétaire de l’ancienne école qui l’hébergeait, reprenait son bien immobilier. L’arrondissement, propriétaire du bâtiment sur Christophe-Colomb, propose d’abord une cohabitation. Cette solution est vite écartée « On s’est rapidement rendu compte que ça n’avait pas de bon sens, dit le directeur général. Par exemple, les deux organismes offraient un camp de jour. Qu’est-ce que les gens allaient faire ? Quel camp choisir, celui du premier étage ou celui du deuxième étage ? Ça aurait été la confusion totale ! »
L’idée de fusionner a ainsi germé. « On ne voulait surtout pas que ça se fasse dans une perspective d’absorption d’un organisme par un autre. Le Centre Lajeunesse ne l’aurait pas accepté et nous (le Patro Le Prévost), on avait aussi besoin de changement. On s’est mis à le penser en fonction d’une maxime un peu clichée, mais qui résume bien la situation : un plus un égale trois. Et on a cheminé vers ça. »
Des défis
Le chemin n’a pas été de tout repos, insiste Daniel Côté. Il y a évidemment eu la crise de la COVID-19, dont le déclenchement a coïncidé avec l’emménagement de l’équipe du Centre Lajeunesse dans les locaux du Patro. Il y a eu le choc des cultures, puisque l’un des organismes était syndiqué, l’autre non. Il y a eu la gestion de l’espace. Il y a eu des retards dans les démarches administratives, reportant la création du nouvel organisme en janvier 2021, plutôt qu’en septembre 2020, comme prévu.
« Ça se passe bien, mais il y a des défis. Le principal est d’implanter une nouvelle culture. On ne doit pas reproduire celle de l’un ou l’autre des deux organismes. On repense tout, on ne reproduit rien de façon automatique. Donc, ça peut devenir énergivore. »
De nouveaux services
La fusion a permis d’améliorer l’offre de service existante. Dans le secteur de la prévention de la sécurité urbaine, huit médiateurs urbains ont depuis été embauchés. Dans le secteur de l’aide alimentaire, la popote roulante peut désormais livrer entre 800 et 1000 repas par semaine, comparativement à 400 auparavant. Dans le secteur du loisir, un nouveau gymnase de boxe a été inauguré, une salle sensorielle, ainsi qu’un nouvel auditorium. Le Patro Villeray offre également des activités parascolaires dans quatre écoles primaires du quartier.
Les idées de projets inspirants fusent, dit Daniel Côté, mais il faut parfois tempérer certaines ardeurs pour conserver une saine vitesse de croisière pour les équipes. « D’abord, il y a l’idée de faire naître le poupon, et après, il faut savoir gérer sa croissance. Notre poupon, il s’est développé assez vite. On est à l’étape de trouver notre équilibre là-dedans. »
L’expérience de cette fusion a amené Daniel Côté à réévaluer certains aspects de son milieu. « Il y a une réflexion à mener sur la complémentarité de nos actions, dit-il. Les bailleurs de fonds l’ont dans une perspective financière, mais ça ne doit pas s’arrêter là. De temps en temps, un électrochoc, ça peut faire du bien. Pour nous, la mutualisation, ça a été une claque, oui, mais une bonne claque. »