(Photo: 123RF)
Que doivent retenir les entrepreneurs de cette première joute verbale télévisuelle entre les chefs des quatre principaux partis de la campagne électorale fédérale de 2021?
Les Affaires est resté rivé à son écran pour identifier les passages de ces échanges musclés qui concernent de près ou de loin les entreprises de la province lors du Face-à-face 2021 sur les ondes de TVA.
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Vaccin en milieu de travail
La question de la vaccination contre la COVID-19 s’est taillé une place très tôt dans la discussion. Lorsque l’animateur Pierre Bruneau a demandé aux chefs si les employés qui refusent de se faire vacciner devaient se faire montrer la porte, Jagmeet Singh du Nouveau Parti démocratique (NPD) a indiqué que des conséquences devaient être imposées à celles et ceux qui s’opposent à le faire, sans préciser lesquelles.
De son côté, le chef du Parti conservateur du Canada (PCC) Erin O’Toole préfère miser sur les tests de dépistage rapide plutôt que d’imposer la vaccination, tout en soulignant l’importance d’avoir des «accommodations raisonnables» en tant que société.
Justin Trudeau du Parti libéral du Canada (PLC) a quant à lui affirmé que ces personnes perdront leurs privilèges si elles ne se font pas vacciner, comme voyager en train ou en avion par exemple, martelant l'importance de recevoir les deux doses pour contribuer à mettre un terme à la pandémie.
Pénurie de main-d’œuvre
Alors que les autres chefs de partis vantaient leur plan de créer de nouveaux emplois notamment en région pour relancer l’économie, le chef du Bloc québécois (BQ) Yves François Blanchet a soulevé l’ironie de ces promesses au moment où les entreprises peinent déjà à combler les 800 000 postes vacants au pays, dont 12 000 au Québec. Ce dernier a rappelé l’importance de miser sur la productivité, ou de «créer plus de richesse avec moins de travailleurs», tout en demeurant vague sur les moyens à mettre en place pour y arriver. Il souhaiterait aussi que le Québec rapatrie des programmes d’immigration économique. Ce sont les ressources dont dispose le Québec pour enseigner le français aux nouveaux arrivants qui devraient fixer ses cibles d’immigration, croit-il.
La prestation canadienne de la relance économique (PCRE) et la prestation canadienne d’urgence (PCU) ont toutes deux été qualifiées de freins à la reprise de plusieurs secteurs d'activité, bien que Jagmeet Singh se garde quelques réserves à l'égard de ces aides fédérales «qui ne permettent même pas d’obtenir le salaire minimum». Il estime que c'est plutôt les salaires offerts pour ces emplois qui devraient être révisés.
Défendant les décisions prisent par son gouvernement, Justin Trudeau a rappelé les nombreux leviers mis en place, comme la Subvention salariale d’urgence, l’aide aux loyers et les comptes d’urgence, qui ont été essentiels à plusieurs entreprises pendant la pandémie. Il a affirmé qu’il souhaitait continuer à les aider, en maintenant par exemple la PCU dans les secteurs encore affectés par la pandémie, comme les arts. «La pénurie existait avant la pandémie, et elle existera après», a-t-il rappelé.
Les conservateurs comptent aider les PME en donnant plus d’autonomie en matière d’immigration économique à Québec. Ils souhaitent aussi assurer une meilleure connexion à Internet dans les régions éloignées, réduire les programmes comme la PCRE et la PCU qui freinent selon lui le retour des Canadiens sur le marché du travail et augmenter les seuils d’immigration.
Français en entreprise
Tous se sont entendus pour souligner l’importance de protéger le français et en bloquer le déclin dans la province.
Le chef du PCC s’est d’ailleurs félicité d’avoir «lancé un débat d’urgence pour se prononcer sur le recul du français à Montréal». Il a affirmé vouloir appliquer la loi 101 aux entreprises à charte fédérale, tout comme Jagmeet Singh.
Justin Trudeau a même dit vouloir travailler avec François Legault pour trouver des solutions.
Yves-François Blanchet a laissé entendre qu’en matière de défense de la langue française, «le Québec peut se débrouiller».
Stabilité politique
Rappelant toute l’instabilité que crée une élection pour les entreprises, surtout en période pandémique, l’animateur Pierre Bruneau a demandé aux politiciens présents au débat s’ils comptaient former un gouvernement de coalition afin de demeurer en poste pendant quatre ans, s’ils étaient élus minoritairement.
Justin Trudeau a indiqué que «le Canada n’avait pas une telle histoire», mais a précisé que son gouvernement avait démontré être capable de faire des concessions depuis le début de la pandémie. Il estime que ces élections sont une occasion «d’obtenir un mandat clair» des Canadiens alors que la crise sanitaire tire à sa fin. Il a confirmé qu’il pourrait «très bien déclencher de nouvelles élections dans 18 mois», si son parti était minoritaire.
Erin O’Toole a affirmé qu’il allait «toujours travailler pour l’intérêt des Canadiens», même s’il est minoritaire, et ce, pendant quatre ans s’il le faut.
Jagmeet Singh a dit vouloir poursuivre le travail «d’avancer les enjeux qui leur tiennent à cœur» au cours de son mandat.
Yves-François Blanchet, qui a maintes fois répété que le gouvernement «est supposé (sic) respecter les mandats de quatre ans», a affirmé qu’il continuerait de défendre les intérêts des Québécois, tout en glissant plus tard qu’un gouvernement minoritaire permettait une meilleure balance du pouvoir.