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BLOGUE INVITÉ. Ces temps-ci, le terme «automatisation» est sur toutes les lèvres. Cet engouement est causé par l’intelligence artificielle (IA), qui viendra chambouler nos méthodes de production. Ce n’est cependant pas la première fois que l’automatisation suscite un tel enthousiasme. En effet, au cours des derniers siècles, le milieu manufacturier a subi de nombreuses transformations de ses processus d’automatisation. Aujourd’hui, entrez dans n’importe quelle usine et voyez ces milliers, voire ces millions de produits créés grâce au génie de la robotique. Or, malgré toutes les avancées technologiques, l’IA s’apprête à propulser l’industrie manufacturière dans une nouvelle ère.
Les robots des usines d’aujourd’hui ont besoin d’un environnement incroyablement stable. Ils ne sont pas dotés d’intelligence. Une fois configurées, ces machines ne s’adaptent pas aux changements: elles répètent un geste précis selon une position, un angle et en un laps de temps programmés au quart de tour. Un minime écart a lieu dans la séquence et hop! Vous venez peut-être de perdre votre produit.
Avant l’arrivée de l’intelligence artificielle, les investissements en automatisation avaient pour but de rendre l’environnement plus stable. Toutefois, le coût de ces machines extrêmement précises est faramineux et pour qu’elles soient rentables, elles doivent produire d’énormes quantités de produits. Cela a mené l’industrie dans une logique de production de masse rigide et moins flexible, moins apte à répondre aux besoins variés de la population et du marché.
L'IA permet aux machines de s’adapter immédiatement aux changements dans l’environnement de production. Elle perçoit et comprend celui-ci en assimilant l’information complexe fournie par des capteurs en temps réel, et peut ensuite effectuer des changements subtils que même un humain ne pourrait percevoir. Cela implique beaucoup plus que la réduction du nombre d’imperfections sur la chaîne de production; cela veut dire que la production peut désormais s’adapter rapidement aux demandes et aux goûts du marché. Nous sommes à l’aube d’une nouvelle économie industrielle, mais plusieurs étapes sont à franchir avant d’en arriver là.
Inspection
Le premier aspect qui a déjà grandement progressé est celui de l’inspection. À cette étape, l’IA est en mode observation et n’effectue pas encore d’actions concrètes. Elle utilise ses habiletés sensorielles pour détecter des anomalies et signaler des problèmes aux inspecteurs. Cette collecte d’information s’effectue grâce à des capteurs, comme des caméras ou des microphones, posés sur les machines existantes. Non seulement ces capteurs examinent les produits, mais ils observent aussi la machine elle-même, ce qui nous amène à la prochaine étape.
Maintenance prédictive et configuration des machines
Au fur et à mesure que les nouveaux capteurs observent l’état de la machine, l’IA accumule de l’information afin de prédire quand celle-ci pourrait tomber en panne. Les capteurs peuvent aussi être utilisés pour examiner et prédire les variations dans son environnement. Cette information peut ensuite permettre aux machines de s’autoréguler, par exemple en s’ajustant à la température, à du nouveau matériel ou à la vitesse de la chaîne de montage.
Robots
Grâce à l’information des capteurs qui donne une grande compréhension de son environnement, l’IA peut commencer à manipuler intelligemment la fabrication des produits, en donnant un coup de main aux travailleurs. Déjà, le marché voit apparaître des bras de robots et des drones qui peignent, soudent ou coupent des pièces pour des petits lots en série ou pour des produits hautement spécialisés.
Préhension
La dernière étape importante est la préhension, c’est-à-dire la capacité de saisir des objets, mais pour l’instant, les robots sont de piètres élèves en cette matière. C’est à cette étape que les morceaux sont assemblés et que s’automatise la transition des produits de la chaîne de montage vers des boîtes et des camions. C’est également la partie la plus imprévisible de l’environnement et la plus difficile à laquelle s’adapter pour le robot. La manipulation des objets sera la dernière composante de l’automatisation. Elle donnera plus de flexibilité à la production, car les robots pourront prendre et déplacer librement les produits d’une section de la ligne de montage à l’autre, sans aucun problème. Bien que nous soyons encore à quelques années d’y arriver, la préhension constituera une habileté générique du robot et complètera le processus d’automatisation de la chaîne de montage.
La nouvelle économie industrielle
En résumé, pour atteindre le niveau de précision souhaité dans la fabrication des produits, l’automatisation industrielle telle que pratiquée aujourd’hui requiert un environnement très prévisible, stable et coûteux. Pour être rentable, elle doit produire en masse des millions d’objets identiques. Avec l’intelligence artificielle, tout le processus de fabrication est appelé à devenir flexible et économique; il pourra aussi s’adapter à tous les changements. Cette nouvelle économie industrielle est une occasion pour les compagnies de changer leur modèle d’affaires ainsi que la façon de répondre aux besoins de leur clientèle.
Certains changements réduiront drastiquement les coûts. Considérez par exemple l’industrie aéronautique : il n’y a pas deux parties d’un avion qui ont exactement la même taille, ce qui rend incroyablement difficile, donc trop coûteuse, l’automatisation de ce genre de production. Avec la nouvelle capacité d’adaptation de l’IA, les modèles financiers seront bouleversés et cela pourrait même permettre l’arrivée de nouveaux joueurs dans ce secteur jusqu’à ce jour impénétrable.
Au-delà des coûts, les opportunités pour les compagnies sont infinies. Imaginez simplement comment ces changements pourront interagir avec la quantité d’information toujours grandissante de l’Internet des objets ou encore avec des réseaux entièrement automatisés de livraison par des drones et des véhicules autonomes. Le meilleur est à venir.