Sociofinancement: comment réussir sa levée de fonds

Publié le 30/09/2016 à 11:59

Sociofinancement: comment réussir sa levée de fonds

Publié le 30/09/2016 à 11:59

Qui n’a pas déjà rêvé d’ouvrir sa boîte à lettres et de recevoir une enveloppe remplie de billets verts, de la part d’un étranger à l’autre bout du monde?

C’est ce que propose le sociofinancement, l’équivalent français du crowdfounding, qui consiste à financer son projet en faisant appel à sa famille, ses amis, ses voisins, les amis de ses amis, bref à la communauté intéressée par le projet.

La sollicitation s’effectue généralement par l’entremise d’une plateforme en ligne, telle Kickstarter et l’argent est directement viré sur votre compte PayPal! Le concept a certainement de quoi faire rêver, surtout quand on pense aux campagnes qui ont simplement pulvérisé leur objectif de levée de fonds initial (pour être ébloui autant que je l’ai été, allez voir Exploding Kittens ou encore Fidget Cube). Devant ces succès retentissants, pourquoi pas moi, vous diriez-vous? 

En fait, c’est un peu plus compliqué que ça. Récemment, Geneviève Rousseau, fondatrice de BonApp, une entreprise qui vise à lutter contre le gaspillage alimentaire, était à HEC Montréal pour partager ce qu’elle a appris lors de sa propre campagne de sociofinancement. Effectuée sur la plateforme québécoise La Ruche, Geneviève a atteint son objectif de recueillir 10 000$.

1. Une campagne, ça se prépare!

L’objectif d’une campagne de sociofinancement, au-delà de l’aspect monétaire, est de créer une communauté forte qui vous appuiera tout au long de votre projet et même après. Il est donc important d’informer vos supporters quelques semaines à l’avance, afin qu’ils soient prêts lorsque la campagne débutera. Cet exercice a également pour but de bâtir un momentum. À cet effet, planifiez une soirée de lancement, afin de rencontrer vos supporters et pour démarrer votre campagne en trombe! Les 48 premières heures sont généralement cruciales, donc profitez-en pour recueillir le plus de fonds possible. Faites toutefois attention à vos coûts pour cette soirée; chaque dollar dépensé est un dollar qui vous éloigne de votre objectif.

2. Une communication efficace

Lorsqu’il s’agit de diffuser rapidement de l’information, les médias sociaux sont aujourd’hui le nerf de la guerre. Afin d’en retirer le maximum, il faut avoir en sa possession du contenu de qualité, facilement partageable. Une bonne vidéo peut aller loin, on n’a qu’à penser à la récente campagne MTLenPoche de Poches & Fils et Potloc, dont la vidéo a été vue plus de 240 000 fois sur Facebook et ce, sans publicité payante. L’effet boule de neige est là : plus une vidéo est partagée, plus elle devient virale et plus les gens voudront suivre le mouvement.

3. Kickstarter, Indiegogo, gofundme ou La Ruche?

Des plateformes de sociofinancement, il y en a pour tous les goûts et le simple fait de comprendre laquelle utiliser est un travail en soi. Laquelle choisir? Cela dépend de vos besoins. Voici quelques critères à considérer :

Sphère d’activité/industrie

Désirez-vous financer la confection du prochain Exploding Kittens, la création d’un gadget technologique révolutionnaire ou plutôt la mise en scène d’un spectacle d’humour? Êtes-vous un athlète de haut niveau qui a besoin de fonds pour se rendre à Tokyo 2020? Certaines plateformes, comme Kickstarter, se spécialisent dans des produits innovants et créatifs provenant des quatre coins du monde, alors que d’autres, telle La Ruche, n’acceptent que des projets qui contribuent au rayonnement et à la vitalité de leur région.

Modèles de financement

Il y a deux principaux modèles, soit « All or Nothing » (AoN) ou « Keep it All » (KiA). Dans le cas de AoN, vous fixez un montant cible et l’argent est prélevé des donateurs que si l’objectif est atteint. À défaut, vous repartirez bredouille. Le modèle KiA, quant à lui, vous permet de garder l’entièreté des fonds recueillis, quelle que soit l’issue du projet. Des frais plus importants pourraient cependant être à prévoir.

En sachant cela, est-ce qu’il est mieux de se fixer un objectif plus conservateur ou d’y aller le tout pour le tout? Bonne question. Voici le vécu de Geneviève : si les supporters sont conscients que le principe du tout ou rien (AoN) s’applique, ils se sentiront plus concernés et seront donc plus enclins à contribuer.

Frais

Peu importe la plateforme, des frais sont de mise. La moyenne est autour de 5%, mais ce chiffre pourrait monter jusqu’à 15% pour certaines plateformes très nichées comme PledgeMusic. C’est en quelque sorte la commission de la plateforme. Si vous optez pour le modèle AoN, ils ne sont chargés que si vous atteignez votre objectif. Dans le cas du financement KiA, la commission est facturée peu importe l’issue de la campagne. À noter que des frais de traitement de 3%-5% en moyenne sont également facturés pour chacune des transactions qui passent par les tierces parties comme PayPal ou Stripe. Grosso modo, c’est donc 10% de votre récolte qui vous sera amputée. Ouch. Dans le cas de Geneviève, c’était 1 000$ qui venaient de s’envoler.

Expérience utilisateur

Lorsque vous aurez finalement convaincu l’ami de votre voisin de vous appuyer, le processus devrait être simple et rapide. Quoi de plus embêtant que d’avoir sa carte de crédit en main et ne pas savoir comment vous virer ces 15$ ? Certaines plateformes sont plus faciles à apprivoiser que d’autres; prenez donc le temps de tester par vous-même quelques options avant de vous décider.

4. Et c’est parti!

Une fois que le coup d’envoi est donné, il faut à présent garder le rythme. Le pire est une campagne qui stagne, car rappelez-vous, les gens aiment faire partie d’un buzz. Garder le rythme signifie souvent écrire personnellement à chacun de vos contacts (et de les relancer) et de leur «quêter» de l’argent. Conseil de Geneviève : dimanche soir est généralement un bon moment pour le faire. Les gens sont à la maison et donc plus enclins à voir votre message.

5. L’après-campagne

Ok, vous avez levé les 250 000$ nécessaires pour votre projet. Félicitations, vous avez réussi cette étape. Certains vous diront toutefois que c’est ici que le vrai travail commence, car on peut se planter même après avoir levé des millions (voir Save, Take Eat Easy et ChicTypes). En effet, c’est maintenant le moment de gérer votre croissance et de tenir vos engagements envers vos donateurs en leur faisant parvenir les cadeaux et les récompenses que vous leur avez promis en échange de leur soutien. Geneviève recommande de se fixer une marge de 80%-100% sur les cadeaux en dessous de 40$, car ce processus prend énormément de temps. Assurez-vous donc de ne pas promettre plus que ce que vous pouvez livrer.

Une campagne de sociofinancement peut représenter un travail à temps plein. Elle doit être rigoureusement planifiée et avoir des objectifs réalistes (sur Kickstarter, 70% de projets qui aboutissent ont un objectif inférieur à 10 000$). Cependant, le jeu en vaut la chandelle : vous aurez passé une étape importante, votre projet sera connu dans la communauté ciblée et vous aurez déjà une base de supporters fidèles qui pourra parler de votre projet à d’autres potentiels clients!

 

À propos de ce blogue

Aux missions de recherche théorique et appliquée des universités s’ajoute désormais une mission de création de valeur pour la société. Grâce à nos recherches, nos données sur l’entrepreneuriat, grâce aux histoires des entrepreneurs que nous accompagnons, de même qu’aux voyages que nous réalisons chaque année avec nos étudiants dans les endroits les plus réputés pour leur culture entrepreneuriale, nous offrirons, deux fois par mois, un regard critique sur ce qui se fait ici (et ailleurs) en termes d’entrepreneuriat, repreneuriat et gestion des familles en affaires. Dans cette chronique, nous partagerons au grand public notre point de vue sur l’actualité entrepreneuriale québécoise.