Eh oui, je l’avoue, tout récemment, pendant un souper de famille à la maison, j'ai eu une conversation concernant le décès et la planification testamentaire avec mon frère et ma belle-sœur. C’est vrai que ce n’est pas toujours une conversation joviale à avoir, mais c’est toujours un sujet qu’il est nécessaire d’aborder.
À travers les années, j’ai eu la même conversation avec des centaines de clients. Ce soir-là, par contre, je me suis sentie coupable, en tant que grande sœur travaillant dans le domaine de la planification successorale, de n’avoir jamais clarifié la perception erronée que mon frère et sa conjointe avaient de l’utilité d’avoir un testament lorsqu’on est en relation de couple.
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J’entends souvent des gens me dire : «… ce n’est pas grave si je n’ai pas de testament, ma famille s’en chargera après mon décès et mon (ma) conjoint (e) héritera de toutes façons, ça fait 20 ans que nous sommes ensemble.» En effet, les gens pensent souvent à tort que l’époux (se) a des droits acquis sur la succession et que ce n’est pas nécessaire d’avoir un testament pour le confirmer. Mais ceci est faux!
Au Québec, si nous décédons sans testament, la succession se règlera selon les paramètres décrits dans le code civil. Et ce qui est écrit dans le code civil n'est pas nécessairement ce que vous aviez en tête!
Donc, prenons la situation réelle de mon frère. Il est marié depuis presque 4 ans et n'a pas d'enfants. S'il décède sans avoir eu la chance d'écrire son testament, son épouse n'héritera pas de la totalité de sa succession. Ma belle-sœur devra partager la succession de mon frère avec mes parents : deux tiers lui reviendront, alors que l’autre tiers reviendra à mes parents.
Cependant, le fait qu’ils soient mariés permettrait potentiellement à ma belle-sœur de réclamer plus que les deux tiers lui revenant puisqu'ils possèdent un patrimoine familial. En effet, elle aurait le droit de réclamer, en comptant, la moitié de la valeur de la maison, des REER, de la voiture, des meubles-meublant, du chalet et du fond de pension, ces actifs faisant partie des actifs du patrimoine familial. La valeur de cette réclamation s’ajouterait à la valeur des deux tiers de la succession lui revenant, mes parents héritant de la balance. Il ne faut pas oublier que le calcul de la valeur de cette somme se fait à partir de la date du mariage, donc de ce qui a été acquis après leur union. Dans le cas de mon frère, comme ils sont mariés depuis seulement 4 ans, il est possible que les montants en question soient très peu significatifs. Cependant, pour des couples mariés depuis longue date, la situation peut être différente.
La possibilité que ma belle-sœur hérite de la totalité de la valeur de la succession existe aussi. Pour cela, mes parents devraient renoncer à leur part, en sa faveur. Ceci serait évidemment la situation souhaitable pour mon frère.
Mais imaginez des beaux-parents qui ne sont pas aussi raisonnables et qui décideraient d’honorer les règles du code civil. Cela veut donc dire qu'une bru (ou un gendre) peut devenir copropriétaire de la maison du couple avec ses beaux-parents, et qu’elle (il) doive acheter la part des beaux-parents pour en rester l’unique propriétaire.
Mieux vaut donc être en bons termes avec la famille afin que tout puisse se régler amicalement! Mais une chose est certaine, nous pouvons éviter ces désagréments potentiels en ayant un testament rédigé en faveur de nos conjoints!
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