Quand on parle de la France, c'est généralement pour causer vins, voyages ou fromages, mais rarement de création d'entreprises. Et pour cause. Grèves, lois du travail contraignantes, impôts et hypersyndicalisation ne semblent pas rimer avec entrepreneuriat.
Pourtant, une petite révolution se prépare au pays de Sarko, et elle touche principalement les travailleurs indépendants qu'on voudrait plus nombreux parmi les Français.
En fait, le nouveau statut de " l'auto- entrepreneur ", entré en vigueur le 1er janvier, est si intéressant qu'on aurait avantage à l'étudier chez nous afin d'en importer les éléments les plus dynamiques.
L'idée derrière la création de ce statut d'entrepreneur individuel est de faciliter la création d'entreprise. Pas de paperasse à remplir ni de taxe de vente (en France, la TVA) à percevoir, les auto-entrepreneurs sont exemptés de tenir une comptabilité complexe et n'ont pas à remplir de véritable déclaration fiscale. On leur demande de faire des versements mensuels ou trimestriels en fonction de leur chiffre d'affaires, point à la ligne.
On distingue deux types d'auto-entrepreneurs : les prestataires de service (chiffre d'affaires maximal de 32 000 euros, soit environ 54 700 $) et les commerçants de biens, y compris les fournisseurs de logement (chiffre d'affaires maximal de 80 000 euros, soit environ 136 000 $).
Tout citoyen peut bénéficier de ce statut, qu'il soit étudiant, salarié, retraité ou sans emploi, et ce, sans risquer tout son patrimoine. En effet, en plus de sa résidence principale, l'entrepreneur individuel peut, par une simple déclaration notariée, rendre insaisissables tous ses biens fonciers dans la mesure où ils ne sont pas affectés à l'usage professionnel.
Bien sûr, on pourra trouver les taux d'imposition élevés : 23 % pour les prestataires de service et 13 % pour les commerçants de biens. Cependant, ces taux comprennent l'ensemble des charges sociales.
Ce qu'il faut retenir de ce statut, c'est sa simplicité. Et aussi de bonnes idées comme celle-ci : l'auto-entrepreneur peut cumuler les revenus de ses activités à ceux d'un emploi ou de toute autre source. En effet, le régime fiscal de l'entreprise indépendante reste autonome, à moins que le revenu gagné par ailleurs soit élevé. Imaginons un couple d'enseignants avec deux enfants qui décideraient de louer des chambres avec déjeuner durant l'été. En plus de leurs salaires imposables, ceux-ci pourraient générer jusqu'à 136 000 $ de chiffre d'affaires et ne payer que 17 680 $ en impôts et charges sociales supplémentaires. On ouvre un petit gîte en Provence ?
En plus de créer de la richesse, cette initiative aura sans doute pour effet de faire reculer le travail au noir. En France, pour bénéficier de toute la couverture sociale disponible, il faut travailler. Grâce au faible niveau d'imposition du statut d'auto-entrepreneur, gageons que beaucoup de femmes de ménage, de rénovateurs du dimanche et de gardiennes d'enfants seront tentés de déclarer leurs revenus.
Cela dit, grâce aux exemptions de toutes sortes et à la déduction des frais de fonctionnement, les petits prestataires de services restent certainement plus avantagés au Québec. Pour les autres, c'est moins clair. Une chose est certaine, avec cette petite révolution, la France démontre qu'elle est capable d'innover et qu'il faudra maintenant s'intéresser à elle autrement que pour son histoire, sa culture ou sa gastronomie !
lesaffaires.redaction@transcontinental.ca
Stéphanie Kennan est présidente de Bang Marketing.